
Est de la RDC : des représentants autochtones témoignent au procès de Roger Lumbala à Paris
À Paris, le procès de l’ancien chef rebelle congolais Roger Lumbala se poursuit, malgré l’absence persistante de l’accusé. Poursuivi pour complicité de crimes contre l’humanité et association de malfaiteurs pour des faits commis dans l’Est de la RDC, il refuse de comparaître depuis l’ouverture des audiences. Mercredi 26 novembre, alors que Lumbala brillait une nouvelle fois par son absence, la Cour a poursuivi l’audition des témoins, dont deux représentants du peuple autochtone Bambuti, originaire de la région d’Epulu.
Des récits bouleversants sur les violences subies
Premier à témoigner, un chef coutumier Bambuti a décrit à la barre la situation historique de sa communauté : une population marginalisée, stigmatisée et longtemps tenue à l’écart par les autorités comme par les groupes voisins.
Un autre témoin, incapable de dater précisément les événements, a raconté une scène particulièrement traumatisante : le viol de sa sœur, alors enceinte, par trois hommes qu’il identifie comme « les effaceurs ». Malgré les efforts pour la sauver, elle est décédée trois jours plus tard. Il rapporte également que sa tante lui a confié avoir elle-même subi des violences sexuelles, tout en rappelant que ces souffrances demeurent souvent tues au sein de leur communauté.
Interrogé sur la place des femmes dans la société Bambuti, il a expliqué qu’elles y sont considérées comme égales aux hommes, en raison de leur rôle essentiel dans la transmission de la vie un contraste avec certaines pratiques bantoues, a-t-il ajouté.
Un témoin affirme avoir vu Roger Lumbala
Le président de la Cour lui a demandé s’il avait déjà vu l’accusé. « Oui, j’ai vu M. Lumbala », a-t-il répondu. Il se souvient de l’avoir aperçu en costume, lors d’un meeting organisé près d’une piste d’atterrissage située à proximité de son campement. « À l’entendre, il parlait comme s’il était le président de la République », a-t-il ajouté.
Cibles de l’opération “Effacer le tableau”
Interrogé sur les raisons pour lesquelles les Bambuti ont été visés par l’opération « Effacer le tableau », le témoin a dénoncé la responsabilité de la guerre alimentée par les autorités, tout en évoquant le profond mépris dont sa communauté est victime depuis des générations. « Pour les Bantous, nous sommes comme des animaux », a-t-il déclaré. « Nous n’avons aucune valeur à leurs yeux. »
Quant aux croyances attribuant des pouvoirs magiques aux Bambuti, il a répondu avec amertume : « Si nous avions réellement ces pouvoirs, ni moi ni les miens n’aurions été capturés. Nous aurions pu chasser ces militaires. »
Un rare moment d’écoute pour une communauté longtemps ignorée
Au terme de son audition, le chef coutumier d’Epulu a confié avoir, pour la première fois, le sentiment que la justice reconnaissait enfin les crimes subis par son peuple, marqué par des décennies de persécutions et de déni de leur existence en tant que peuple autochtone à part entière.
Pendant ce temps, Roger Lumbala continue de refuser de se présenter à la barre ou de faire face aux témoins. Une attitude en contradiction avec ses déclarations lors de l’enquête préliminaire, au cours de laquelle il accusait les « pygmées » d’être des « menteurs ».
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