
RDC : Neuvième sommet des Grands Lacs, Kinshasa veut relancer une diplomatie régionale en panne
La République démocratique du Congo accueille, ce samedi 15 novembre, le 9ᵉ sommet de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs (CIRGL). Une rencontre majeure, la première au niveau des chefs d’État depuis novembre 2020, qui réunit les dirigeants des douze pays membres autour d’un objectif affiché : redonner souffle à une organisation souvent jugée marginalisée sur la scène diplomatique africaine.
Les délégations ministérielles ont précédé les chefs d’État à Kinshasa. Dès le 14 novembre, plusieurs ministres ont pris part à un forum en marge du sommet, consacré à de grands projets économiques régionaux.
Des corridors stratégiques pour un marché intégré
Au menu des échanges, trois chantiers d’infrastructures destinés à renforcer l’interconnexion économique :
| Projets structurants | Objectifs régionaux |
|---|---|
| Corridor de Lobito | Acheminement des minerais congolais vers l’Atlantique via l’Angola |
| Corridor ferroviaire Tanzanie–Burundi–RDC | Désenclavement commercial et logistique vers l’océan Indien |
| Route Ouganda–Centrafrique via la RDC | Intensification des échanges transfrontaliers en Afrique centrale |
Pour Kinshasa, ces grands axes doivent transformer le potentiel minier de la région des Grands Lacs en une croissance économique partagée.
« Le Congo doit être un trait d’union », a expliqué la Première ministre Judith Suminwa, assumant l’ambition d’une diplomatie tournée vers l’économie. Prenant la tête de la CIRGL, la RDC affirme vouloir replacer l’institution au cœur des dynamiques de coopération continentale. « Notre responsabilité historique, c’est de rassembler plutôt que de diviser », a-t-elle insisté.
Un expert ayant assisté aux discussions estime que cette orientation économique représente une « opportunité de transformation » pour une CIRGL jugée « en perte de vitesse » depuis plusieurs années. L’objectif affiché : faire de l’organisation un instrument de développement régional, et non plus seulement un cadre de gestion de crises.
Relancer une organisation jugée « quasi inexistante »
Avec cette présidence tournante, le gouvernement congolais entend donner un nouveau souffle à une structure longtemps éclipsée par d’autres mécanismes diplomatiques en Afrique.
« Discrète, voire quasiment inexistante », reconnaissait récemment un conseiller de Kinshasa, rappelant que la CIRGL peine à produire des résultats visibles depuis plusieurs années.
Le ministre congolais de l’Intégration régionale, Floribert Anzuluni, résume les priorités de son pays en deux axes :
🔹 la paix et la sécurité
🔹 la coopération économique
Le spectre des crises régionales, absent rwandais remarqué
Malgré la volonté de placer l’économie au centre du sommet, les questions sécuritaires s’imposeront naturellement dans les échanges. En particulier, la guerre dans l’est de la RDC, où les affrontements se poursuivent entre l’armée congolaise et le mouvement armé M23, soutenu par le Rwanda, selon Kinshasa et de nombreux rapports internationaux.
Fait notable : aucune délégation rwandaise n’a fait le déplacement à Kinshasa. Ni expert, ni diplomate, ni représentant politique, encore moins le président Paul Kagame. Une absence qui pèsera sur les discussions, alors que des négociations ont été entamées ces dernières semaines à Doha et à Washington, sans apaisement durable sur le terrain.
Parmi les autres dossiers sensibles attendus :
| Conflits et tensions à l’ordre du jour | Situation actuelle |
|---|---|
| Guerre civile au Soudan | Conflit meurtrier depuis avril 2023 |
| Violences post-électorales en Tanzanie | Contestations liées à la réélection de la présidente Samia Suluhu Hassan |
| Tensions régionales persistantes | Rivalités diplomatiques entre États membres |
Sur ces crises, la CIRGL a été jusqu’ici accusée par certains observateurs de silence diplomatique, nourrissant des doutes sur sa capacité d’action.
Un test décisif pour la diplomatie congolaise
Pour Kinshasa, ce sommet revêt donc une double dimension :
🎯 réhabiliter la CIRGL comme outil de paix et de coopération
🎯 affirmer le leadership géopolitique de la RDC au moment où le pays entend repositionner son rôle au cœur du continent.
Carrefour stratégique entre l’Afrique centrale, orientale et australe, la RDC se présente comme un acteur indispensable à toute dynamique régionale durable.
En conclusion
Ce 9ᵉ sommet de la CIRGL pourrait marquer un tournant. En misant sur les infrastructures, les échanges commerciaux et l’intégration économique, la RDC veut prouver qu’une stabilité durable ne naîtra pas uniquement des négociations militaires, mais aussi de l’interdépendance des économies et du développement partagé. Reste à savoir si les États membres suivront cette orientation, alors que les fractures sécuritaires demeurent, notamment avec l’absence remarquée du Rwanda.


